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Курс французского языка 4 том Г. Може; (стр. 42 из 81)

L'impératrice passe la nuit à bord de son yacht qui, le lendemain matin,
à 8 heures, s'engage dans le canal. «Le Greif», qui porte l'Empereur
d'Autriche et le Prince héritier de Prusse, suit «L'Aigle»puis c'est le
Khédive à bord de son yacht, «Le Maroussah», le Prince de Hollande
à bord d'un vaisseau hollandais et 60 navires de tous genres, de tous bords,
de tous tonnages... Chacun porte le grand pavois, et c'est un long ruban
multicolore qui se déroule au milieu des sables du désert.

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Ferdinand de Lesseps a été invité par l'Impératrice à rester à ses côtés
à bord de «L'Aigle»... Au bout d'un moment, sans souci du protocole, il
s'endort dans le fauteuil où il s'est assis... C'est qu'il a passé une mauvaise
nuit... La veille, en grand secret, un de ses collaborateurs est venu l'avertir
qu'un rocher, qui a échappé à tous les sondages et dragages, vient de
provoquer un accident au milieu du canal: un petit bâtiment égyptien
chargé d'éclairer la route est venu se briser sur ce rocher et de telle manière
que le cortège officiel ne pourra passer... Mais ce n'est pas au moment où
tous ses efforts vont recevoir leur récompense qu'un homme comme
Ferdinand de Lesseps se décourage. Il a donc immédiatement pris ses
dispositions, donné ses ordres pour que le programme fixé puisse se
dérouler jusqu'au bout... Il faut que «L'Aigle» passe, et derrière lui les
68 vaisseaux qui prouveront à l'univers que le désert est vaincu, que la
Méditerranée est unie à la mer Rouge autrement que sur le papier... Repris
par son optimisme, Lesseps en arrive même à se féliciter de cet accident.
Que serait-il arrivé en effet si c'était «L1 Aigle» qui fût venu se briser sur ce
rocher? Toute la nuit on a travaillé... Et, avant que le signal du départ ait
été donné au cortège officiel, Ferdinand de Lesseps a appris que le bateau
échoué a pu, à bras d'hommes, être tiré jusqu'à la rive et que l'on a fait
sauter à la dynamite le malencontreux rocher. Le passage est libre... Une
fois de plus, l'ancien diplomate a eu raison d'être optimiste... Une fois de
plus la chance s'est trouvée à ses côtés comme elle s'y est trouvée le 171 au
matin quand, après une journée et une nuit de pluie ininterrompue, le soleil
s'est levé radieux pour éclairer la première cérémonie prévue, la
bénédiction du canal... L'Impératrice, qui ignore tout des alarmes que son
cousin a traversées pendant les dernières heures, l'admire de conserver son
calme, d'être maître de ses nerfs au point de pouvoir prendre quelques
instants de repos alors que, de toutes parts, les acclamations montent vers
lui...

Les populations des villes, des villages du voisinage, des campements
qui sont nés là comme des champignons, se pressent en effet sur les deux
rives. L'Impératrice leur sourit, leur adresse des saints de la main et elle
sent monter des larmes à ses yeux quand, dans la rumeur qui l'enveloppe,
elle distingue le nom de la France et celui de Bounaberdi2.

«Comme c'est beau!., murmure-t-elle... Comme c'est beau!..»

A 11 heures 1/4, le cortège arrive à Raz-el-Ech, à 14 kilomètres de
Port-Saïd, à midi et demi, à Kantara, puis, par EI-Ferdane, El Guisr, on
atteint le lac Tim-sah et l'on s'arrête à Ismaïlia3, où l'on passera la nuit...

Soixante mille personnes sont accourues. Pour que cette foule ne

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couche pas ù la belle étoile, le Khédive a mis à sa disposition mille tentes,
et, pour qu'elle ne meure pas de faim, deux cents tables où chacun peut
boire et manger gratuitement, et pour l'entretien desquelles un crédit de
deux millions a été ouvert a un restaurateur du Caire. Un palais qui
a féeriquement surgi des sables accueille le Khédive et ses invités qu'un
banquet réunit à la fin de la journée. A l'issue de ce banquet, M. de Lesseps
reçoit des mains de l'Impératrice la grand-croix de la Légion d'honneur et
des mains d'ismaïl la grand-croix de l'Osmanié4, pendant que dans la nuit
de velours éclate un feu d'artifice auquel succède un bal où, sur des
rythmes de Strauss et de Métra5, cinq mille danseurs et danseuses valsent
jusqu'au matin.

Le lendemain 19 novembre, le cortège qui s'égrène dans le sillage de
«L'Aigle» quitte Ismaïlia à midi et demi, passe à Toussorn et à Sérapéum
et atteint les lacs Amers à 4 heures et demie. Le 20 sera le dernier jour do
navigation à travers le désert: parti à 7 heures 1/4, on arrive à l'entrée de la
mer Rouge quatre heures plus tard. Le canal a été parcouru de bout en
bout,... Les 68 navires qui constituent la flotte impériale et khédiviale ont,
de Port-Saïd à Suez, parcouru sans accident ni incident l'itinéraire que
suivront les paquebots, les cargos qui, d'Europe, voudront désormais aller
vers Aden et l'Ethiopie, vers l'Inde et la Birmanie, vers Madagascar et le
Transvaal, vers le Japon et l'Australie, vers l'Indochine et vers Java
L'Europe est directement reliée à l'Asie*.

RENÉ JEANNE. Ferdinand de Lesseps (1942)
Примечания
:

1. 17 ноября 1869 г. 2. Имя, данное на востоке Бонапарту. 3. Город на Синайском
полуострове, названный в честь хедива (вице-короля) Египта Исмаила-паши. 4. Ту-
рецкий орден, учрежденный в 1861 г. 5 Композиторы, авторы знаменитых вальсов

Вопросы:

* Suшмуяыur une carte les étapes du cortège Puis démontrez les avantages énormes qui
r
eprésentait l'ouverture du (anal pour les peuples du monde entier

HÉSITATIONS DE PASTEUR (1822 1895)

De tous les savants français. Pasteur est sans aucun doute le plus populaire.

C'est que ses découvertes ont sauvé des milliers et des milliers de vies
humaines en révélant la cause des maladies contagieuses et les moyens de les

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prévenir. Il serait donc vain de faire le panégyrique de celui qui, entre autres
titres de gloire, parvint le premier à prévenir la rage après morsure de chien
enragé. Mais ce qu'il faut souligner, parce qu'on le sait moins peut-être, c'est
l'admirable conscience de l'illustre biologiste: ses scrupules, au moment où il
expérimenta son traitement sur le petit Meister, qui venait d'être mordu par un
chien enragé, montrent qu'en lui le savant n'avait point étouffé l'homme.

Pasteur est face à face avec cet enfant qui, dans quelques jours, va
mourir. Il hésite...

Lui qui, au cours de sa vie, a eu toutes les audaces, qui s'est, attaqué aux
plus grands des, savants et aux théories les plus solidement établies, lui qui
a détruit les dogmes scientifiques dont vivait l'humanité1 lui qui a brisé les
idoles et qui seul a secoué les colonnes du temple, le voilà qui, pour la
première fois, hésite.

«La séance hebdomadaire de l'Académie des sciences, a écrit Pasteur,
avait précisément lieu le 6 juillet; j'y vis notre confrère M. le docteur
Vulpian, à qui je racontai ce qui venait de se passer. M. Vulpian ainsi que
le docteur Grancher, professeur à la Faculté de Médecine, eurent la
complaisance de venir voir immédiatement le petit Joseph Meister et de
constater l'état et le nombre de ses blessures. Il n'en avait pas moins de
quatorze.

«Les avis de notre savant confrère et du docteur Grancher furent que,
par l'intensité et le nombre de ses morsures, Joseph Meister était exposé
presque fatalement à prendre la rage. Je communiquai alors à M. Vulpian
et à M. Grancher les résultats nouveaux que j'avais obtenus dans l'étude de
la rage depuis la lecture que j'avais faite à Copenhague, une année
auparavant.

«La mort de cet enfant paraissant inévitable, je me décidai, non sans de
vives et cruelles inquiétudes, on doit bien le penser, à tenter sur Joseph
Meister la méthode qui m'avait constamment réussi sur les chiens.»

Les inoculations furent faites chaque jour du 7 au 16 juillet. On
commença par la moelle de quatorze jours2 pour finir par celle de un jour.

«Le soir de cette épreuve redoutable, a écrit René Vallery-Radot, le
petit Meister, après avoir embrassé son «cher monsieur Pasteur», comme il
l'appelait, alla dormir paisiblement. Pasteur passa une nuit cruelle.
L'insomnie, qui épargne d'ordinaire les homm,es d'action, ne ménage pas les
hommes de pensée. Ce mal les étreint. A ces heures lentes et sombres de la
nuit où tout est déformé, où la sagesse est en proie aux fantômes, Pasteur,
hors de son laboratoire, perdant de vue l'accumulation d'expériences qui lui
donnaient la certitude du succès, s'imaginait que cet enfant allait mourir».

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Seule, Mme Pasteur ne douta jamais.

Le traitement du petit Meister achevé, Pasteur, brisé par trop
d'émotions, consent à prendre quelques jours de repos avec sa fille et son
gendre dans un coin du Morvan.

Mais la pensée de l'enfant le hante. Chaque matin, il attend fiévreuse-
ment la lettre ou le télégramme de Grancher qui donnera des nouvelles de
Meister. Il passe des heures silencieuses à marcher, aux côtés de son
gendre, dans la solitude des bois.

Cependant, les jours passent. Pasteur se rassure. Le petit Meister est
sauvé*!

PASTEUR VALLERY-RADOT. Pasteur (1938)

Примечания:

l.Пacтep был создателем микробиологии. 2. Пастер прививал больным вытяжку
из спинного мозга кролика, зараженного бешенством, вирулентность (болезнетворная
способность) которого ослаблена с помощью специальных методов. La moelle de 14
jours .— спинной мозг, выдерживавшийся для такого ослабления в течение 14 дней.

Вопросы:

* Qu'y a-t-il de pathétique dans ce récit?

LES FRÈRES LUMIÈRE

Le cinéma a pris une telle importance dans notre vie que nous avons peine à
imaginer qu'en somme il date d'hier: plus précisément de ce jour de la fin du siècle
dernier, où deux Français, les frères Lumière, présentèrent, dans le sous-sol d'un
café de Paris, le premier spectacle cinématoêraphique qui put se voir au monde.

La première séance publique payante de cinéma eut lieu le 28 décembre
1805. D'un côté de la porte conduisant au Salon Indien du Grand-Café
était placardée une grande affiche lithographique représentant une foule
distinguée, parmi laquelle des élégants en haut de forme2, qui faisait la
queue pour pénétrer dans la salle du «Cinématographe Lumière».

De l'autre côté, une seconde affiche donnait le programme de la séance:

ГSortie de l'usine Lumière à Lyon.
2° Querelle de bébés.

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3° Les poissons rouges.
4° L'arrivée d'un train.
5° Le régiment.
6° Le maréchai-f errant.
7° La partie d'écarté.
8° Mauvaises herbes.
9° Le mur.

10° La mer.

Antoine Lumière et ses deux fils3, ceux-ci vêtus d'une jaquette
cintrée — le dernier cri de la mode — l'œil fiévreux, la moustache dressée,
se tenaient au contrôle.

Dans la cabine de projection, le chef mécanicien de Monplaisir4,
Moisson, tournait la manivelle, tandis qu'un de ses collaborateurs réglait
l'éclairage de la lampe et réenroulait les bandes à mesure qu'elles avaient
été projetées.

Le prix des places avait été fixé à un franc pour un spectacle d'une
durée de vingt minutes — chacune des dix bandes projetées avait une
longueur de 16 à 17 mètres.

La veille au soir, avait eu lieu une répétition générale à laquelle les
Lumière avaient convié les membres de la presse et quelques personnalités
parisiennes, dont le prestidigitateur Georges Méliès, directeur du théâtre
Robert-Houdin, et plusieurs autres directeurs de salles.

Une fois parvenus au bas de l'escalier qui menait au Salon Indien, les
invités se trouvèrent dans une salle longue, garnie de fauteuils, éclairée par
deux rangées de becs de gaz. Dans le fond était tendu un petit écran
semblable à ceux utilisés pour les projections de lanterne magique.

Lorsque les lumières eurent été éteintes, apparut sur l'écran une vue de
la place Bellecour5. Quelques invités firent la moue.

«C'est pour nous faire voir des projections qu'on nous dérange! dit
Méliès6 à l'oreille de son voisin... Mais j'en fais depuis plus de dix ans!»

Mais brusquement s'avança un cheval traînant un lourd tombereau et
suivi d'autres voitures. Puis survinrent des passants qui marchaient,
remuaient les bras, la tête, parlaient, riaient... Toute l'animation de la rue
soudain ressuscitée apparaissait sur le petit écran avec une intensité
inimaginable.

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Quelques spectateurs poussèrent des exclamations de surprise. Les
autres restèrent bouche bée, muets d'étonnement.

Quand, du fond de la place Bellecour, surgit une charrette lancée au
galop qui se dirigeait à toute vitesse vers la salle, des spectateurs firent
instinctivement le geste de se ranger. Plusieurs dames se levèrent d'un bond
et ne se décidèrent à se rasseoir que lorsque la voiture eut tourné et disparu
sur le côté de l'écran.

On sourit quand apparut le «Bébé mangeant sa soupe», mais aussitôt
tout le monde chuchota:

«Oh! regardez les arbres du fond! Leurs feuilles bougent au vent.»

Cela semblait si merveilleux, si extraordinaire!.. Non, tous ces gens
n'avaient jamais vu de feuilles bouger de cette façon, jamais des arbres ne
leur avaient paru si vivants. Ils avaient l'impression de découvrir tout
à coup un monde insoupçonné.